L’envol
Vendredi 17 août 1990 :
Ce matin, au petit déjeuner, je réalise seulement que je ne vais plus revoir ma mère et ma sœur avant un long moment, dix mois exactement. Les nombreux silences accompagnant le petit-déjeuner et les derniers préparatifs sont pesants, angoissants. Quelle épreuve difficile cela a été pour ma mère. Mon insouciance m'a protégé jusqu'alors et je n'ai eu que très peu de temps pour penser aux conséquences d'une telle séparation, fort heureusement.
Je lui fais la bise dans la véranda et part valise à la main avec mon père, chargé de m'accompagner jusqu'à l'aéroport. Je ne me retourne pas.
Dans le train, je reconnais une jeune fille rencontrée lors du week-end de tests organisé à Tours. Je ne sais plus exactement quel était le pourcentage de réussite mais la sélection n'a pas été si simple que cela. Les diverses épreuves passées ont permis aux organisateurs de vérifier le niveau de chaque candidat en anglais et en culture générale, mais également et surtout, de dresser un portrait psychologique de chacun. Les familles américaines qui nous accueillent une année durant le font bénévolement, il est hors de question de leur envoyer un jeune dont le comportement risque de poser des problèmes.
Arrivé à l'aéroport, je retrouve tous les autres exchange students, candidats à l'expatriation, dont la plus jeune à 14 ans. La séparation avec mon père est moins douloureuse que celle de la matinée mais un nouveau pincement au cœur me rappelle l’importance de celle-ci.
J’embarque enfin pour mon baptême de l’air : direction Chicago !